Le chômage est un signe de santé et de progrès !
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On
ne viendra jamais à bout du chômage car le chômage est avant tout un signe de
santé et de progrès. Il est donc inutile de le combattre : il faut au contraire
l'intégrer pleinement dans notre économie et le considérer non pas comme un
désastre mais comme signe extérieur de progrès. Je m'explique :
On oublie constamment que
la cause principale du chômage provient des formidables progrès technologiques
dont nous bénéficions depuis plus d'un siècle. Partout, des procédés – d'abord
mécaniques, puis électriques, et maintenant électroniques – nous libèrent en
exécutant à notre place des tâches de plus en plus complexes, et l'ordinateur
et ses dérivés en sont bien sûr l'exemple le plus concret.
Un nombre incalculable de corvées et de professions a
disparu en raisons de nos avancées technologiques, et c'est une bonne chose
pour l'Humanité tout entière. Mais il faut cesser d'être illogique : on ne peut
pas à la fois se libérer du joug du travail et regretter d'avoir perdu ce
travail. La ménagère qui appuie sur le bouton de sa machine à laver, ne
regrette certainement pas l'époque pénible du lavoir. L'agriculteur qui cultive ses terres, calfeutré dans son tracteur
informatisé, ne regrette pas davantage le temps du soc tiré par un boeuf. Personne
ne pleure les diligences ni les lampes à pétrole ! Alors pourquoi le progrès
qui génère du temps libre et du bien-être au niveau individuel, devient-il un
élément hautement perturbateur sur le plan social ?
La réponse est extrêmement simple : technologiquement, nous sommes au 21e siècle alors que sur le plan politique et social nous
pataugeons encore en plein 19e siècle !
Nos lois, nos règles,
notre organisation, notre conception du travail, fonctionnent toujours selon
des schémas vieux de plus de cent ans et totalement inadaptés à notre
environnement technique. Et c'est de cette discordance entre avancées
scientifiques et vétusté sociale que proviennent tous nos maux.
L'industrie naissante du 19e
siècle avait besoin de bras
pour faire tourner les usines et autres entités économiques (mines, routes,
transports, administration, etc.). Toute l'organisation sociale et industrielle
s'était donc orientée vers ce principe simple : il faut attirer un maximum de
main d'œuvre pour produire ! C'était normal, on n'avait pas le choix…
Aujourd'hui, l'industrie n'a plus besoin de toute cette
main d'œuvre et la rejette. Les robots envahissent tous les domaines et
personne ne peut rien y changer.
Enfant, lorsque je prenais le métro, j'achetais mon
ticket auprès d'un guichetier, puis un autre le poinçonnait. Chaque station
avait un responsable de quai, et dans chaque rame siégeait un préposé à
l'ouverture et à la fermeture des portes. Aujourd'hui je peux circuler sans
rencontrer âme qui vive puisque tout est automatique et que certaines lignes
n'ont même plus de conducteur du tout !
Et c'est la même chose dans presque tous les domaines.
Tout ce qui est automatisable ou informatisable l'a été ou le sera, et la main
d'œuvre est devenue une denrée périmée.
C'est une bonne et belle chose que des emplois stupides,
dégradants ou pénibles aient été confiés à des machines. Mais qu'en est-il des
hommes et des femmes qui vivaient de ces emplois ?
Et qu'on ne vienne surtout pas nous dire, comme dans les
années 70, qu'il ne s'agit que de déplacements de main d'œuvre. L'expérience
prouve qu'il y a transfert, certes, mais dans des proportions infimes et que
nombre de transférés sont laissés quotidiennement sur la touche.
Vouloir éradiquer le chômage en créant des emplois est
donc une utopie car le but de nos avancées technologiques est précisément de
supprimer des emplois et de faire travailler l'électronique à notre place… Nous
sommes donc en pleine contradiction avec nous-mêmes…
Il n'y a donc que deux solutions. La première serait
d'arrêter le progrès et de détruire les machines. Ca serait radical et
efficace. Les guerres d'ailleurs s'en chargent régulièrement et les pays en
cours de reconstruction ne connaissent que rarement le chômage. Mais je crois
que personne ne souhaite de retour en arrière, guerre ou pas guerre…
La seconde solution serait de se débarrasser enfin de
notre mode de pensée du 19e siècle.
Tant que l'on s'accrochera à
cette idée périmée que le travail est obligatoire et indispensable pour vivre,
on ne s'en sortira pas !
Il faut donner un sens et une valeur différente au
travail. Il faut penser la société différemment. Il faut réorganiser la
répartition des richesses sur d'autres critères. Peut-être faut-il créer des
outils d'échange autre que l'argent, de nouvelles valeurs, de nouvelles règles
?
La mutation se fera, c'est certain, peut-être en douceur,
peut-être dans le choc d'une révolution, mais elle se fera !
Facile à dire, me diront les accros du travail, mais
difficile à réaliser…
Pas si sûr ! Car ce type de société a déjà existé de par
le passé.
Depuis l'Antiquité, toutes les sociétés qui ont pratiqué
l'esclavage ont fonctionné sur le principe du refus de travailler. Qui a vu que
les Grecs ou les Romains, vautrés au milieu de leurs esclaves, se plaignaient
du chômage ? Bien au contraire, plus ces gens étaient entourés, mieux ils se
portaient. Le général vainqueur qui ramenait des foules de chair fraîche au
lendemain de ses campagnes ne détruisait certes pas l'équilibre économique de
son pays et n'était pas accueilli comme un destructeur d'emplois.
Alors pourquoi sommes-nous à ce point incapables de
reproduire ce que nos lointains ancêtres ont su mettre sur pied. Quelles
différences entre eux et nous ? Leurs esclaves étaient de chair et de sang,
alors que les nôtres sont de métal et d'électronique...
Et alors ?
Gérard
Denamps.
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